Voici le récit (ou plutôt la définition d’une journée de m****) de mon retour de Corse, Propiano (LFKO) pour rejoindre mon aérodrome sur le continent, Albertville (LFKA). Nous sommes le dimanche 30 juin 2019, il fait très chaud ! Je voyage avec mon frère (non pilote) sur un DR400-180.
Bonne lecture !
9h00 : petit déjeuner et premier briefing pour notre vol en formation de manière à terminer notre séjour en beauté sur cette île ;)
Organisation des séquences de décollages des 4 avions 1-1-2, point de rassemblement, leaders, trajectoires…
10h15 : arrivée à l’aérodrome, merci le taxi et à la prochaine !
10h45 : visite prévol puis mise en route. Je démarre avec un peu de difficulté. Un coup d’œil sur le voltmètre m’indique un niveau bas de la batterie, mais le moteur démarre et la charge remonte avec l’alternateur. RAS sur le roulage et les essais moteur, je décide de poursuivre.
11h22 : décollage de la patrouille. Vol inoubliable, carrément magique ! Imaginez 4 appareils en formation sur les côtes Corse, avec une eau parfois bleue turquoise, des yachts de millionnaires, des plage de nudiste (non je plaisante :p ) ! On prend du plaisir et on fait chauffer les Gopro !
Le vol se déroule parfaitement bien. On rentre sur LFKO, je commence à avoir faim et à fatiguer après cette patrouille qui demande pas mal de ressources.
12h15 : on doit donner à boire à nos machines pour le retour sur le continent. Il y a d’autres pilotes devant nous, on les aide à pousser les avions pour ne pas perdre de temps.
Le tuyaux de la pompe se bloque, je mets les mains dans le cambouis et je tâche mon pantalon blanc youhouu !
13h28 : on a terminé de refueler, direction le restau de l’AD. On fait le point météo, tout semble ok avec une menace météo vers 21h00. En effet des orages sont attendus pour ce soir dans les Alpes du nord, on se donne 15h00 comme heure de départ.
15h00 : on paye, on fait un pipi rapide et on saute dans les avions. Les copains mettent en route, mais mon avion a décidé de rester un peu plus longtemps et refuse de démarrer (bah oui, c’est beau la Corse). Je fais signe à mes co-équipiers de partir. Je vais bien trouver une solution…
Le niveau de la batterie est encore plus bas que ce matin mais cette fois le démarreur ne tourne même plus. Les lampes fonctionnent, les fusibles sont tous en place. Je décide de faire le tour des hangars pour trouver un groupe de démarrage.
Miracle ! L’école de parachutisme en a un. Problème, ils refuses de me le prêter et se foutent complètement de mon problème (ps : je retiens les amis et le monde de l’aéro est très petit).
Je ne perds pas espoirs et je fais le tour des clients du restaurant pour trouver une batterie (oui j’ai vraiment l’air d’un con, mais il me faut une solution !). Je me rapproche donc de l’agent de piste qui a collecté nos taxes à la sortie de l’avion le vendredi et qui nous a indiqué où nous parquer. Cet individu n’a vraisemblablement pas comprit que je recherche désespérément une solution et me dit que je ne dois pas laisser l’avion ici cette nuit car il gène (il était pourtant sur le parking en herbe) .
Je lui dis que je compte bien quitter l’île avant ce soir et que je suis en train de chercher une batterie et des câbles. Il me dit :
j’ai une voiture, mais j’ai pas de câble.
Ok… je continue ma recherche. Je retourne voir l’école de parachutisme, je réexplique que je n’ai vraiment aucune solution. La personne me répond que le propriétaire du groupe de démarrage n’est pas là. Je demande à avoir son numéro pour avoir l’autorisation. On me répond :
Le pilote est en vol en Italie et il ne te répondra pas…
J’ai compris, vive l’entraide…. J’appelle mon instructeur (on est dimanche mais bon… il me répondra avec plaisir LUI) pour un avis sur une autre méthode de démarrage... Il me déconseille vivement de lancer l’hélice à la main. Je lui dis que je vais alors essayer de contacter les mécaniciens auto du coin… Je dérange également de responsable entretien de mon aéroclub qui m’apprend l’existence d’une trappe sous la moquette de la soute de mon DR400, où se trouve un câble avec des princes croco d’un côté et de l’autre une prise à brancher sur le fuselage de l‘avion ! Perfect !
15h45 : j’appelle le BRIA pour prévenir de mon retard sur le plan de vol et je retourne alors voir l’agent de piste qui m’a dit qu’il a une voiture, mais pas de câble. Cette fois je lui dit :
j’ai un câble, mais pas de voiture
il me répond qu’il ne peut pas rentrer sur le terrain avec sa voiture. Je lui répète que je n’ai aucune solution et qu’il suffit d’ouvrir le portail (en plus il a les clés !!!)... Il accepte mais j’ai compris que cela l’ennuie (pour rester poli).
Je l’attends 10-15 minutes à l’avion pendant qu’il papote avec quelqu’un au portail.
Le temps d’attente me semble interminable ! Je regarde une 10ème fois la météo en attendant, cela parait bon pour la destination même en partant un peu après 16h00, j’émets quelques réserves tout de même car je n’ai pas la précision sur le moment exact ni sur la position où les orages vont naitre. J’ai un dégagement à Vinon (LFNF) et Grenoble Isère (LFLS) si jamais.
16h15 : l’agent arrive à côté de mon avion pour brancher sa batterie à l’avion. Il me dit :
Je viens de laver ma voiture et tu vas me la pourrir, il faudra me rembourser le lavage.
Je précise : herbe complètement sèche, léger risque de poussière à la limite et encore car il est stationné en dehors du flux de l’hélice…
Alors sur le coup je rigole, je me dis qu’il plaisante. Mais non… Il me redit la même chose avec plus d’insistance. J’ai dans la poche un billet de 10 que je m’apparaitrais de toute façon à lui donner pour le coup de main (tellement généreux), donc je lui donne et je lui dis :
Commencez déjà par fermer vos fenêtres si vous ne voulez pas pourrir l’intérieur de votre voiture….
La tension batterie monte un peu mais toujours pas de démarreur, je me penche alors sous les fusibles pour y voir de plus près au niveau des branchement. Et là, juste sous mon nez un contacteur placé sous le disjoncteur du démarreur ! Tous les fusibles étaient bien en place mais ce petit bouton rouge n’était pas enfoncé comme les autres. Et merde… je rappuie dessus et là forcément, ça démarre. Je remercie notre sauveur pour son dévouement, je débranche le câble and go !
Bref j’ai à nouveau l’air con, j’avais pourtant vérifié tous les fusibles, mais pas cet interrupteur… La tension faible du matin (et le niveau de la batterie après le restau) n’était alors qu’une coïncidence m’ayant orienté vers un mauvais diagnostic de la panne. Ce bouton a soit été touché quand mon passager a embarqué, soit lorsque j’ai remis les couvertures après le vol en formation de manière à protéger les sièges de la chaleur pendant le restau. Bref, c’est parti !
16h30 : je décolle et je monte à 2000 ft puis je contacte Ajaccio pour activation du plan de vol et transit. Aucune réponse ! Je vérifier les fréquences radios et je grimpe jusqu’à 4500-5000 ft en me disant que les reliefs empêchent peut être les ondes de passer. Après plusieurs minutes je reçois enfin une réponse (ce n’est vraiment pas mon jour, vous allez vous en apercevoir…) !
Plan de vol actif, GO TO LFKA.
La météo est belle, on voit tout au fond quelques cellules orageuses qui se développent.
Tout se passe bien jusqu’à St-Tropez où je perds encore un peu de temps. Le contrôleur me demande de prendre un cap nord, ensuite ouest, ensuite nord, puis je peux reprendre une sorte de 030-040° si mes souvenirs sont exacts, pour retrouver ma route, les Aples, Barcelonnette (LFMR) puis LFKA. Les nuages sont encore très hauts et la visi >10 km. En revanche il y a bien des orages au loin mais pas sur ma route.
Arrivé au lac de Ste-Croix je vois effectivement un bel orage à gauche, un bel orage à droite et la visi a diminué.
J’apprendrai plus tard que mes amis ont pu passer entre les deux. Ayant plus d’une heure de retard, la situation est plus incertaines pour moi. Je décide d’aller pécher les informations auprès du SIV. La personne m’indique que deux avions viennent d’essayer le transit mais ont préféré passer par la vallée du Rhône, elle me demande mes intentions.
Je lui dis que je la recontacte (le temps de préparer mon déroutement vers Vinon pour remettre un peu d’extra fuel avant la vallée du Rhône). Elle me répond :
Restez prudent.
Je lui annonce effectivement mon déroutement vers LFNF. Le ciel devient plus sombre car une énorme couche de nuage s’étale à haute altitude sur la tropopause. Je surveille l’évolution avec mon frère, on a le temps de voir venir les choses et on ne se mettra pas en danger de toute façon.
18h55 : avitaillement Vinon.
19h10 : on repart, direction Valence pour contourner un beau TCU.
Les données météo sont encore bonnes pour rejoindre Chambéry. Je décide alors de poursuivre en guettant bien dehors. Je vais tenter Valence.
Ça passe… le plafond descend peu à peu (Massif central : orage et Alpes du Sud : orage). Je tente alors Grenoble Isère, si ça ne passe pas, demi-tour direction Valence. Le plafond descend encore mais on est encore loin des minima VFR.
Ça passe toujours très bien, on vole maintenant à 5000 ft. On continue alors vers Chambéry, le ciel est gris mais le vent est calme, super !!!
20h58 : Je suis heureux :
Enfin arrivé frérot, yeeeah ! Tape-la !.
On arrive verticale Montmélian (à 24 km de notre destination) et là on se fait secouer comme des pruniers ! On observe au loin un mur gris/noir, des éclairs et Albertville invisible, noyée dans l’orage. Et merde on y était presque ! Sans tarder je déroute sur Chambéry et j’atterris. On se dépêche de sortir nos affaires, de bâcher l’avion (sous un vent assez fort c’est compliqué et la pluie est au rendez-vous également) puis de se réfugier dans l’aéroport le temps d’appeler un taxi .
Tout est fermé, on aperçoit une porte avec de la lumière côté piste, on entre, mais il n'y a personne… l’aéroport est vide !
J’appelle un taxi, puis on essaye de trouver la sortie en suivant les accès de secours. On passe par les postes de filtrage, on déverrouille des portes pour pouvoir passer...
Je décide alors de contacter la Brigades de Gendarmerie des Transports Aériens (BGTA) pour expliquer notre situation et surtout avertir que nous avions débloqué certains accès sécurisés en précisant que nous n’avons rien cassé. Ils me remercient d’avoir prévenu et m’indiquent que des agents de sécurité vont venir. Le taxi est de l’autre côte de la porte et nous attend.
22h50 : mon frère déclenche une alarme ultra bruyante en essayant de sortir... On a décidé d’attendre les agents de sécurité, j’ai expliqué la situation au taxi qui pouvait également attendre.
23h10 : toujours rien, je rappelle la BGTA. Ils me disent :
les agents de sécurité ne vont pas se déplacer, si vous n’avez rien cassé vous pouvez partir par l’issue de secours même si ça fait tout sonner
Je réponds :
Nous n’avons rien cassé, nous ne sommes pas des voyous ne vous inquiétez pas. Merci et désolé pour le dérangement… .
23h20 : dans le taxi. Ça pète de partout, le ciel est bombardé d’éclairs, on se prend même un peu de grêle, c’est ultra violant sur toute la Savoie et la Haute-Savoie. Mon frère reprend sa voiturer à Albertville, quand à moi je dois encore faire un aller/retour de 30 min pour récupérer mon ordinateur et quelques affaires chez notre Juju chez qui j’avais dormi le jeudi soir et reprendre la route vers Annecy.
01h45 : je manque de me prendre un premier renard, heureusement je suis tellement fatigué que je roule à 90 pour 110. Peu après un second renard sur une route à virage, j’ai le temps de le prendre en photo cette fois.
02h30 : j’arrive chez moi !!! Toute cette galère est terminée ! Ou pas…
Je vais m’offrir un verre de sirop à la cuisine et là je vois une armée de fourmis qui forme une ligne de 3m entre levier, le placard à gâteaux et l’extérieur… Je me retrouve à 2h30 du matin à chasser les fourmis… Qu’elle journée de merde !
Mais ce n’est pas terminé (personne ne va me croire, me dis-je…). Je regagne mon lit après 45min de chasse aux insectes, et là je sens une odeur fortement désagréable. Ma copine avait gardé les chats de son frère ce week-end là, qui ne se sont pas privé de pisser sur notre lit...
03h15 : hop, je me retrouve à changer les draps, puis je décède jusqu’à 8h00 du matin, car j’ai encore le problème de mon avion à réglé (bloqué à Chambéry et réservé pour de l’instruction le matin à Albertville)
08h30 : je réussi à convenir d’un arrangement avec mon instructeur et les élèves, qui s’occupent de récupérer l’avion dans le cadre d’un exercice de navigation pour le plus avancé des deux et de mania pour l’autre.
Voila un retour bien mouvementé qui restera dans nos mémoires !