tishow16 a écrit:Déjà ils se sont foutus de moi car c'est voler dans le civil qui m'interresse, ce qui signifie pour eux "Tu fous rien, c'est ton airbus qui volera seul etc .. "
Puis ils m'ont clairement dit de changer d'idée tout de suite, par rapport au contexte éco/politique actuel (Chomage).
Dans un Airbus, c'est probablement vrai, autotrim, automanettes à crans qui une fois sélectées ne bougent pas, joystick et commandes de vol électriques, ça vole tout seul!
A l'inverse, aux commandes d'un Boeing on ne s'ennuie pas.
Personnellement, je vole beaucoup, un peu plus de 800h par an.
Vols très courts (20 min pour le plus court), beaucoup de secteurs de 1h30 à 3h et quelques vols relativement longs (5h20 pour le plus long), je ne me suis encore jamais ennuyé depuis mes débuts en ligne.
Pas un vol, pas un seul.
Des vols qui se sont mal passés, des Commandants avec qui le courant ne passait pas, des ennuis divers, fatigue, retards, problèmes techniques, oui.
Evidemment les avis diffèrent suivant à qui tu poses la question et selon le type de vol, la compagnie, l'avion.
Libre aux personnes qui n'exercent pas ce métier de penser que c'est une profession ennuyante et pleine d'inconvénients.
L'avion vole tout seul, c'est plus ou moins le cas en croisière. Pour le reste, que tu voles à la main ou au PA, tu ne t'ennuies pas. L'avion se "pilote" réellement, qu'il s'agisse d'un Cessna Caravan ou d'un A380. On suit très rarement le trajet programmé et briefé au préalable. Directes, paliers alors que tu souhaites continuer ta descente pour rester sur le plan, taux de descente assignés, vitesses managées par l'ATC, tout ça nécessite beaucoup de travail de notre part, que ce soit en poussant des boutons ou aux commandes quand on a l'avion "à la main". Sur un petit terrain, l'ATC te fera moins bosser mais il te faudra souvent faire une approche moins classique, type NDB ou VOR, parfois une visuelle ou une MVI.
Fort heureusement, le métier ne se limite pas au simple pilotage de l'avion. Les phases de préparation sont particulièrement intéressantes, le "setup", les briefings, l'anticipation de ce que va nous demander l'ATC ou d'éventuels imprévus / changement de piste, départs en "raw data" (sans ND / GPS ni Directeurs de vol), choix des niveaux / réajustements en croisière en calculant les vents / vitesse de croisière et conso carbu suivant les niveaux (beaucoup de prises de décisions), checks diverses, discussions passionnantes avec le collègue en place gauche (ou à droite, c'est selon), la vue qui ne déçoit jamais, préparation de l'arrivée, choix d'une STAR - transition - ILS/NDB/VOR/..., calcul des perfos atterrissages, approche sur un nouveau terrain, le plaisir incomparable de poser l'avion à la main (2 atterrissages automatiques CAT III dans les 6 derniers mois pour ma part, en clair ça n'arrive pas souvent).
Tous les moments forts du métier, quasi quotidients. Un exemple récent, cette semaine je me suis posé sur la piste la plus courte depuis mes débuts. Atterrissage avec 40 kts de vent de face au sol et quasi 60 kts en finale. Deux NDB, une visuelle, le reste étant des ILS. Pas un jour sans voir soit un lever de soleil soit un coucher de soleil. Un vol entier sans pilote automatique, en raw data (c'est assez rare cela-dit). Une panne à gérer, un contournement d'une ligne d'orages de 350 km de long et une journée d'astreinte passée les pieds dans l'eau.
On n'oubliera pas non plus l'ambiance équipage, les découchers s'il y en a, semaines hors bases (suivant compagnie) et visites de villes (à titre personnel, j'ai du faire une 15ène de bases/villes en un peu moins de 2 ans, en y restant de 5 jours à plusieurs semaines).
Viennent s'ajouter à ça les progressions de carrière First Officer -> Senior First Officer -> éventuellement SFI (instructeur simulateur pour les QT) -> Captain -> Training Captain -> TRI -> TRE -> Base TRE -> Base Captain, mais aussi des postes annexes type Safety Officer, Fleet manager, CRM instructor, HR, etc ...
Au passage, ces diverses étapes arrivent plus ou moins vite suivant la compagnie. C'est la raison pour laquelle certains pilotes de grandes compagnies réputées pour leurs bonnes conditions de travail, type Air France, postulent de plus en plus dans des compagnies potentiellement moins attirantes à premiere vue, type Emirates, où la progression de carrière intervient beaucoup plus rapidement et où les opportunités sont beaucoup plus nombreuses.
Dans la même catégorie on trouve les changements d'avion et de compagnie, l'aspect "excitant" de l'aventure si j'ose dire, passage de court à moyen puis long courrier, turboprop au réacteur, le rythme de travail dans bien des cas moins chargé qu'un boulot classique (pour ma part je travaille 5 jours (dont une à trois journée(s) d'astreinte où je suis rarement appelé) suivis de 4 jours de repos. J'ai 60 jours de vacances par an dont un mois plein. Les journées les plus longues font 12h, les plus courtes font 4h. En moyenne l'hiver, je dois bosser 25h sur chaque période de 9 jours, et 35 à 40h en été. Le rythme est plus difficile à tenir qu'un boulot classique où tu bosses du lundi au vendredi de 8h a 17h. Certains ne se le sentent pas, personnellement c'est l'inverse, horaires fixes et emploi du temps peu flexible, non merci. C'est pour nuancer.
Enfin, et même si c'est généralement un sujet tabou, le salaire peut atteindre des valeurs plus que motivantes. Je ne suis certainement pas dans la compagnie qui paie le mieux ses employés et je gagne aisément 50% de plus qu'un salaire moyen d'ingénieur débutant. Encore une fois, impossible de faire une généralité, tout le monde ne débute pas sur réacteur et certains ne gagneront jamais un centime après avoir investi temps et argent dans une formation de pilote (une bonne moitié d'entre eux ne trouveront jamais de boulot).
Et quand les gens qui "savent" dissertent sur le fait que "ce n'est plus ce que c'était", tant en terme de qualité de vie que de salaire, ça ne correspond pas à la réalité du milieu si j'en crois mes collègues qui évoluent vite en position (et en salaire ...).
Ca gène généralement les gens de parler d'argent d'autant plus avec un métier qui comporte tant de disparités. En clair, les salaires vont d'une valeur négative (compagnies qui vont jusqu'à te demander de payer pour travailler pour elles, Lion Air en Indonésie pour ne citer qu'elle) à 300 000€ par an (Training Captain / TRE en Chine). De la même manière, personne ne pourra te conseiller ce métier basé sur le salaire des chanceux qui gagnent bien leur vie parce que tu peux tout aussi bien râmer toute ta carrière sans jamais dépasser un Smic ou ne jamais décrocher de boulot dans le milieu. Il n'en reste pas moins que globalement, quand je regarde ce que sont devenus les collègues avec qui j'ai fait la formation, la majorité s'en sort honorablement.
Bref, on pourrait en parler pendant des heures.
Nul doute que nombreux sont ceux qui sont d'un avis différent, ça vaut le coup d'avoir d'autres sons de cloche de personnes qui bossent dans le milieu.
Tu as probablement autant d'avis que de pilotes (et par la même occasion, de parcours).
Je n'ai pas parlé des inconvénients du métier parce que le sujet à déjà été maintes fois abordés, ici et ailleurs.
Les inconvénients sont présents en nombre important et lourds de conséquences. On n'a rien sans rien. Renseigne-toi. J'avais ouvert un sujet il y a un an sur JA pour aborder ces fameux inconvénients, mon avis a en partie changé depuis mais ça donne une bonne idée.
Si on parlait de satisfaction, en englobant tous les profils le bilan est correct mais pas foudroyant. Si on s'en tient aux passionnés qui ont commencés par l'aéroclub, je n'ai encore jamais rencontré quelqu'un qui serait prêt à lâcher ce métier pour un autre boulot, "au sol". Que ce soit les copains qui volent en Indonésie sur PC-6 et gagnent une misère, ceux qui font de l'ATR en Tanzanie, du Beech 1900D et des lignes peu variées depuis une ville du Sud de la France, les pilotes des compagnies low-cost, ceux des majors au Moyen-Orient, etc ...
tishow16 a écrit:où alors si vous pensez que ce métier est totalement bouché, et que je devrai faire plutôt une école d'ingé ... :/
Il est plus que recommandé, voir quasi indispensable, de te munir d'une qualification hors formation de pilote. Un diplôme post-Bac qui te permettra non seulement d'avoir une roue de secours mais aussi d'acquérir une maturité suffisante. A défaut, une expérience pro peut faire l'affaire. Le tout associé à un niveau d'anglais irréprochable qui te demandera plusieurs années à l'étranger, sans quoi tes chances de décrocher un boulot seront proches de zéro.
Dans l'idéal, un cursus qui te permettra de présenter l'Enac, une chance non négligeable qu'on a en tant que français de pouvoir présenter une école gratuite.
C'est mon point de vue. Je n'ai pas d'action ni dans une école de pilotage ni dans une quelconque compagnie.
J'ai une super base dans une compagnie décente, n'en déplaise à certain, avec un rythme de travail qui me convient très bien. Suffisamment de temps libre et de ressources financières pour faire 4 "longs" voyages par an, une centaine d'heures de vol en avion léger et planeur et encore pas mal de temps libre. A l'heure actuelle je suis en train de décider si je passe Commandant d'ici 18 à 24 mois, ou sur 787 assez rapidement ou sur 777 d'ici un à deux ans. Comme je le disais plus haut, une carrière évolue vite et c'est pour ma part un aspect plus que motivant. A chaque étape, nouvelles responsabilités, nouvel avion, nouvelle boîte et collègues, nouvelle ville et un salaire qui sauf exception ne change que pour augmenter. On a coutume de parler de "lifestyle" en anglais et non de "job".
Les deux questions à te poser sont:
- penses-tu être capable de décrocher un boulot une fois les qualifs en poche (niveau d'anglais, débrouillardise, mobilité mondiale, capacité à te créer un réseau de contacts, motivation sans faille et détermination infinie, etc ...)?
- souhaites-tu vivre le côté aventurier d'une carrière qui ne ressemble pas aux autres ou avoir une profession plus stable, "au sol", avec ses avantages/inconvénients associés?