Cela faisait plusieurs fois que nous faisions des séances de tour de piste sur ce brave F152. 3 tours par ci, 5 tours par là, un coup au nord à 1000 ft sol, un coup au sud à 400-500 ft sol. Un coup sur la piste en dur, un coup sur la piste en herbe…. Parfois la manette recule toute seule en montée initiale « pas normal comme situation… », mais il me la suffisamment répété, à cette hauteur, surtout ne pas tirer le volant par réflexe, (ni tout simplement remettre les gaz comme j’ai fait la première fois après la surprise). On est en panne, on cherche à planer et on choisit très vite un champ, pas le temps de réfléchir, nous somme trop bas, on sort tous les volets.
C’est vrai que mes arrondis ne sont pas parfaits. Même si l’approche est stabilisée, je ne pose pas toujours sur la ligne, au centre de la piste comme me le demande mon instructeur. Et pourtant il me guide, "attention la vitesse, vas chercher l’axe, réduis les gaz, maintenant pour l’arrondi, ne rends pas la main, mets le capot sur l’horizon….." Et dès qu’il me laisse faire, qu’il ne dit plus rien, qu’il n’a plus la main prête à bondir sur le volant, j’ai le sentiment que plus rien ne va. Je prépare ma descente trop tôt, trop tard, j’arrondis trop haut, trop bas, pose les 3 roues en même temps. Certes posé pas cassé comme on dit, mais j’ai le sentiment de ne pas y arriver. Au plus profond de moi je ressens que mon instructeur recherche l’atterrissage parfait, peut-être trop . Mais quel niveau faut il atteindre pour y arriver, pour être lâcher ? Je lui pose la question à plusieurs reprises au cours de ces derniers vols : quand est ce que tu crois que je pourrai y arriver ? Quand est ce que je serai lâché ? Est ce que je progresse ? il me faut encore combien de temps tu crois ?
Voila plusieurs séances qu’il me parle d’un vol de contrôle avec le chef pilote. Je ne comprend pas très bien ce que cela veut dire. Il me dit que c’est normal pour valider ma progression.
Hier soir nous avions rendez vous pour une leçon. Ce fameux vol de contrôle était planifié et puis …. Pfff. Non, c’est encore mon FI qui vole avec moi. Le temps orageux a fait qu’il y a trop de vent de travers, des rafales. Justement, on va bosser l’arrondi et le vent de travers. Ce ne sera pas une séance pour rien. Au bout de 4 tours et 2 pannes au décollage à différentes hauteurs, je me pose comme je peux une dernière fois pour un complet. La séance s’achève.
On rentre au club et je remplis les papiers. Et puis…… le chef pilote qui me dis
« - tu veux revoler ?
- Bin euuuh comment dire ? "
l’avion est réservé derrière par un autre élève qui est là, je n’avais pas prévu cela… J’avais bien entendu que quelque chose se tramait, une certaine émulation dans le bureau des instructeurs. Il me force la main. Le vent est tombé, il n'y a pas de circulation ce soir, on va faire le vol de contrôle.
Mon instructeur dit « il faut battre le fer lorsqu’il est chaud »…
j’ai fait 3 atterrissages un peu scabreux tout seul et il m’a remontré par deux fois la correction vent de travers… cela me parait insurmontable.
J’y vais, j’ai mis 30l d’essence à l’arrivée du dernier vol, je fais la visite pré vol et démarre l’avion. Le chef pilote s’installe et nous voila partis pour un tour de piste standard. Je fais un joli tour bien rectangulaire comme je sais bien faire. L’arrondi ne sera pas trop mal et il me demande de rentrer au parking.
« - Attends je reviens… ».
Ahhh et pourtant il descend de l’avion.
Mais c’est mon instructeur qui revient et ouvre ma porte : « Tu veux partir tout seul ? ». Je rougis et deviens écarlate par l’émotion….
"- Quoi ? Qu’est ce que tu as dit ?
- Oui tu fais un ou deux tours tout seul comme tu le sens. Tu fais comme si j’étais là. Mais attention, sans moi, l’avion il va monter beaucoup plus vite."
C’est vrai qu’il fait du poids mon instructeur. Il en prend de la place à bord.
Ai-je le choix dans le feu de l'action ? Je repars donc tout seul, déroule les check lists et m’aligne. C’est vrai, l’accélération et la montée sont beeeaaaauuuucoup plus rapides. Je me poserai pas plus mal que d’habitude et rentrerai au parking. Assez d’émotions comme cela. Mais que ça fait du bien….
Je suis lâché !!!!!
Enfin non. J’ai lâché mon premier élève (sous la supervision et l’accord du chef pilote) mais l’ai vécu comme si cela était pour moi. C’était aussi quand même mon premier lâché d’élève en solo. Même si je suppose que l’appréhension est toujours là. Est-ce le bon moment ? est il prêt ?
J’avais besoin de ce vol de contrôle car encore FI restreint, je n’ai pas le droit d’autoriser le premier lâché. Et puis cela me réconforte d’avoir un autre avis, de savoir si mon apprentissage a été bon. Pas de commentaire à ce sujet. Mon superviseur a le sourire aux lèvres à la suite du vol de contrôle.
« Tu peux y aller, lâche le !!! »
le mot est sorti. Quelle émotion.
« Mais les arrondis ? tu crois que ???? » ; je ne connais pas le niveau accepté, acceptable à ce genre d’exercice. Personne n’est parfait et ne fait deux fois le même atterrissage. Moi-même il m’arrive encore d’en louper malgré les quelques milliers de fois où j’ai fait posé un avion.
« vas y, lâche le. »
Quelle récompense
Merci de m'avoir lu
yannick_FI restreint et heureux