L'avion de chasse français Rafale de Dassault Aviation, qui n'a jusqu'à présent été vendu qu'à la France, a subi un nouvel échec à l'export, Singapour ayant préféré le modèle F-15 de Boeing (NYSE: BA - actualité) .
Au terme d'un long processus de sélection, le ministère singapourien de la Défense a annoncé mardi avoir entamé la phase finale de négociations avec le constructeur américain pour son F-15 Eagle, jusque-là seul en lice avec la version F3 du Rafale français, après l'éviction de l'Eurofighter fin avril.
La commande porte sur une vingtaine d'appareils pour un montant estimé à environ un milliard de dollars.
Fidèle alliée des Etats-Unis, la ville-Etat d'Asie du Sud-est, qui possède une des armées les plus modernes de la région, veut remplacer sa flotte vieillissante de chasseurs A4SU Super Skyhawk.
L'échec du Rafale à Singapour est une nouvelle déconvenue à l'exportation pour ce programme phare de l'industrie de défense française. L'avion de combat, qui compte la France pour seul client depuis son lancement en 1988, avait déjà perdu contre le F-15 de Boeing en Corée du Sud, en 2002, au terme d'une compétition acharnée.
La même année, les Pays-Bas avaient choisi de remplacer les F-16 de l'armée néerlandaise par le JSF de Lockheed-Martin, au détriment notamment du Rafale.
"Une fois de plus, le Rafale de Dassault Aviation arrive numéro deux", commente un analyste aéronautique ayant requis l'anonymat.
"Le choix américain s'est imposé à Singapour", a déploré mardi le constructeur français, qui avance deux explications pour justifier l'échec du Rafale: "la faiblesse actuelle du dollar", qui "constitue un handicap certain pour la compétitivité économique de l'offre française", et le poids politique des Etats-Unis.
La ministre de la Défense Michèle Alliot-Marie a "regretté" le choix de Singapour, en estimant elle aussi que "la faiblesse actuelle du dollar semble avoir constitué un atout déterminant pour nos concurrents".
La France, qui accueille dans le Sud-Ouest des pilotes singapouriens sur des installations d'entraînement, n'avait pourtant pas ménagé ses efforts pour promouvoir le Rafale, un avion de chasse polyvalent capable de mener des missions d'interception, d'attaque au sol, de reconnaissance ou de frappe nucléaire.
Mme Alliot-Marie s'était rendue en mars dernier à Singapour pour vanter le Rafale et le président Jacques Chirac avait également soulevé le dossier lors d'une visite en octobre 2004.
Robert Karniol, rédacteur en chef régional Asie-Pacifique de la revue spécialisée Jane's Defense Weekly, s'est déclaré "un peu surpris" par le choix de Singapour, estimant que le Rafale aurait mieux résisté à l'épreuve du temps que son concurrent américain, plus ancien.
"D'ici 20 ans, je n'imagine pas le F-15 être particulièrement efficace dans cet environnement", a expliqué à l'AFP l'expert basé à Bangkok.
Malgré cette nouvelle défaite, Dassault Aviation ne désespère pas de vendre son chasseur à l'étranger. "La sélection du Rafale en finale à Singapour prouve qu'il a toutes ses chances à l'export", fait-il valoir.
A court terme, l'Arabie Saoudite reste un des derniers espoirs du Rafale. En avril, Dassault avait confirmé l'existence de pourparlers avec le royaume, sans confirmer une commande de 48 appareils évoquée par la presse.
L'Inde pourrait également offrir des débouchés au chasseur français, mais à plus long terme, selon un expert du secteur.
En attendant, l'importante commande française sauve la mise: selon la loi de programmation militaire 2003-2008, l'Hexagone doit s'équiper au total de 234 Rafale pour l'armée de l'air et de 60 pour la marine d'ici 2020.