Tout d'abord, je veux juste dire que l’idée de faire une FAQ (Frequent Asked Questions) sur les prépas me trotte dans la tête depuis trèèèèèèès longtemps, car je trouve qu'il y a beaucoup d'idées reçues (parfois justes, parfois fausses…). Si j'ai le temps, je ferai cette FAQ cet été (mais ça m'étonnerait...
)... En voici un petit bout :
Donc tes questions dans l'ordre :
Oui, il faut être clair, être en prépa, ce n’est pas une partie de plaisir tous les jours. Cela représente même certains sacrifices (sauf si tu es un hyper génie, mais c’est extrêmement rare…). J’y reviendrai dans la suite de ce message. Pour mieux comprendre la prépa, il faut selon moi comparer les choses avec ce que tu connais du lycée :
Les choses identiques au lycée :
- la prépa ressemble au lycée du point de vue de l'emploi du temps : il y a aura des cours (en classe, avec en moyenne 30 élèves/classe) de Maths, Physique, Chimie, S.I., Anglais, éventuellement LV2, Lettres et TPE. Le Sport est facultatif (enfin, parfois c’est obligatoire, mais ce n’est pas la norme)
- C'est tout.
Les différences :
- La charge horaire de chaque matière par semaine est beaucoup plus lourde qu'au Lycée. Pour la PCSI (une des 4 filières de la prépa) :
* 4h TP Physique + 5h de cours + 1h de TD
* 8h de cours de Maths + 2h de TD
* 4h TP Chimie + 2h de cours
* 2h TP SI + 2h cours
* 2h de Lettres
* 2h d'Anglais
* 2h de Sport
* 2h de TPE
* 4h de Devoir Surveillé chaque semaine
* 2h d'interrogation orale (colles) par semaine
Si tu comptes bien, cela signifie donc que tu iras travailler les journées entières du Lundi, Mardi, Mercredi, Jeudi, Vendredi et le Samedi matin. Dans certains lycées (je le sais pour le cas du Lycée Henry IV), tu travailles même le samedi après-midi….
- par rapport au lycée, les "leçons" sont donc plus longues à apprendre d'un cours sur l'autre (puisque qu'un cours dure toujours 2h en prépa, contre 1h au Lycée il me semble...). Ensuite, il faut apprendre ses "leçons" de manière systématique d'un cours sur l'autre, plusieurs fois par semaine (puisqu’il y a plusieurs fois la même matière dans la semaine). Pour certains élèves, le fait d’apprendre régulièrement son cours est une chose toute nouvelle, et c’est parfois ce point qui peut poser difficulté (les (mauvaises) habitudes de lycéens sont parfois très difficiles à perdre…).
- le niveau des cours est plus difficile qu'au lycée (mais avec le temps, on s’y fait…) et les notes vont automatiquement être inférieures à celles que tu as eu l’habitude d’avoir au lycée (ça peut porter un coup au moral.. au début seulement car on y prend habitude et c’est pour tout le monde pareil).
- les professeurs donneront toujours du travail à faire d'un cours sur l'autre (libre à toi de le faire ou pas, un prof n'ira pas vérifier...). Cela peut parfois aussi être un choc pour des élèves trop habitués au mode « touriste » ou « glandouille » de Terminale.
Donc la prépa, c’est l’enfer ? Tout n’est pas si noir…
- la fameuse ambiance de « compétition » en prépa. Je rigole (encore un truc de journalistes pour rendre croustillant son reportage ou son article de presse). J’ai été élève dans une prépa « moyenne » lyonnaise, je travaille dans un lycée de « banlieue » parisienne, je colle dans un lycée prestigieux de la capitale et je connais le fils d’une amie qui est dans une prépa du top 3 des prépas les plus prestigieuses de France. Bilan : je n’ai jamais vu (ni entendu parler) d’ambiance toxique dans les classes, bien au contraire ! Je trouve que les élèves sont hyper solidaires entre eux, ils s’entraident beaucoup (un peu trop parfois :-)), créent des liens forts entre eux. Moi même, je suis encore en contact avec mes "copains de prépa" (15 ans après !)
- le profs ! Les profs de prépa se soucient de leurs élèves, de leurs difficultés, de leur évolution tout au long de l'année. Bref, les élèves ne sont pas livrés à eux-mêmes (électrons libres comme en fac) et les profs de prépa NE SONT PAS DES BOURREAUX dont le métier est de CASSER de l’élève, bien au contraire ! Moi, j'ai même parfois l'impression de "paterner" mes élèves. Pour preuve : les élèves sont parfois reconnaissant de tout ce qu'on fait pour eux (une année, les élèves m'on fait le surprise de fêter mon anniversaire /nous faisons régulièrement des goûters ensembles / les élèves me demandent régulièrement de jouer au foot avec eux / je chambre pas mal d'élèves lorsque je sais que leur équipe de foot favorite s'est prise une raclée / on organise des sortie au théâtre, au Palais de la Découverte, Cinéma, … / il m’est arrivé par deux fois de recevoir des « cadeaux » de la part d’élèves (en fin d’année, je précise
), etc…)
- la prépa permet de se faire une idée assez fidèle du métier d'ingénieur : longueur des journées, ponctualité, quantité de travail, rigueur, sérieux, responsabilités, délais à respecter, difficultés à surmonter au quotidien (la métier d’ingénieur n’est pas un long fleuve tranquille !), autonomie, caractère multitâche, etc…, etc... Quand les élèves de prépa disent que 90% de ce qu'ils apprennent ne leur serviront à rien, ils ont raison ! Sauf que la finalité d'une prépa n'est pas tant d’instruire ! La finalité d'une prépa est d'inculquer toutes ces "valeurs" absolument nécessaires pour être ingénieur : la prépa est une « rampe » vers le métier d’ingénieur.
- faire une prépa (1ère + 2e année), cela conduit à un taux proche de 100% d’intégration dans une école d’ingé (j’ai bien dit UNE école d’ingé, je n’ai pas dit 100% de chance d’intégrer l’ENAC ou l’X ou Centrale…). En effet, il y a plus de places en écoles d’ingé que d’élèves en prépa…
- faire une prépa, aujourd'hui, c'est la garantie de trouver à 80% un boulot dans les 3 mois à la sortie de l'Ecole d'ingé (la France manque d'ingénieurs !). Dans le contexte de crise et de chômage que nous connaissons actuellement, c’est plutôt une bonne chose, non ? Je connais même des écoles où ce sont les entreprises qui viennent chercher les élèves (et non le contraire) !
Alors maintenant le pourcentage d' « échec ». Le mot échec me dérange un peu, car on ne peut pas parler d’échec : faire une prépa, c’est se frotter au niveau d’étude le plus difficile en France. On a bien le droit d’être « allergique » au système prépa, ce n’est pas pour autant qu’on est une merde si on ne passe pas en 2e année. Ces élèves là se rendront compte assez facilement qu’en partant faire autre chose, ils deviendront généralement les meilleurs de leur promo.
Il ne faut pas se leurrer, les élèves subissent un choc important au début de l'année de prépa : les journées sont plus longues, les notes plus basses qu'en Terminale, il va falloir travailler chez soi le soir et les WE, etc... Certains élèves décident alors de partir d'eux-mêmes de la prépa (avant la Toussaint généralement). Ceci représente environ 5% de l'effectif d'une classe. Et puis il y a ceux qui s'accrochent et qui poursuivent une année scolaire entière, mais qui malheureusement ne passeront pas en 2de année : cela représente, selon moi, 10% d'une classe (3 élèves sur un effectif de 30 par exemple). La raison ? Deux possibilités :
*si l'élève est dans une prépa prestigieuse (Henri IV, Louis le Grand, St Louis, St Geneviève, les INSA, etc...) : l'élève ne passe pas en 2e année si son niveau est trop faible (c'est surtout une question de notes, il faut que le lycée ait un taux de réussite proche de 100% aux concours les plus prestigieux pour conserver leur propre « prestige »). Mais cela ne représente que 15 lycées à tout casser sur la France, et encore !
*dans tous les autres lycées, l’élève ne passe pas en 2e année si les professeurs jugent que l’élève n’est pas travailleur (c'est surtout une question de ressenti, et non pas une question de notes). Exemple : si plusieurs fois dans l'année les professeurs se rendent comptent que l’élève n’apprend jamais ses cours, c'est un mauvais point pour lui. Idem si l’élève ne fait jamais le travail demandé (compte rendu de TP, lecture de documents, etc… parfois donné avant les vacances pour après les vacances !). Idem si vous êtes régulièrement absents en cours, aux DS, aux colles.... Dans ces lycées là, si vous paraissez sérieux tout au long de l’année (je répète, ce n’est pas une question de notes), votre passage en spé est garanti !
Pour vous rendre compte concrètement de ce qui se passe chez moi : 1 interro écrite par semaine, toujours le même jour (aucune surprise), toujours sur le cours de la semaine précédente (jamais d'exercice), avec points bonus (c'est à dire qu'il est très facile d'avoir 10 sur 10, voire plus !), devoirs à la maison facultatifs, je ne vérifie jamais si les élèves préparent les exercices à faire à la maison (à eux d’être adultes dans leur tête...), devoirs surveillés une fois toutes les 3 semaines avec toujours un exercice déjà corrigé en cours, etc... Dans ma classe : moyenne de la classe de l'ordre de 10.5/20 à l'écrit et 12/20 à l'oral, moyenne maxi à l'écrit : 15/20, moyenne mini à l'écrit : 06/20. Vous trouvez que c’est le bagne ?
Bref, pour conclure, mon avis est que la prépa n’est pas une partie de plaisir, certes, mais ce n’est pas le portrait aussi « sombre » que tout ce qu’on voit à la TV. Bien au contraire, avec le recul, j’entends beaucoup d’anciens élèves de prépa dire qu’ils ne regrettent pas d’être passés par cette voie. Certes, le prépa représente 2 ans (voire 3 ans) de sacrifices (soirées à travailler plutôt que regarder la TV ou aller aux soirées étudiantes, WE et vacances en partie à travailler plutôt que defaire autre chose), mais croyez-moi, ça vaut le coup ! D’ailleurs, ces élèves là se rattrapent vite une fois qu’ils intègrent les écoles d’ingé :-) !
Ah oui, pour finir, une réponse qu’on pose souvent : faut-il faire une prépa pour devenir pilote de ligne ? La réponse est dans l’absolu... NON. Le taux de réussite à l’ENAC étant extrêmement faible (mais non nul !), c’est une perte de temps de faire une prépa uniquement dans le but d’intégrer l’ENAC. Par contre, comme je l’entends souvent de ML ou de GC232 [mode sans rancune : on ] (si si, il dit des choses juste parfois
) [mode sans rancune : off ], pour devenir ingénieur, économiser pendant ce temps le prix d’une formation de pilote pro grâce à une situation stable (et plutôt bien payée), et attendre le moment opportun pour se lancer dans cette aventure de l’aérien professionnel, et bien je dirais... OUI, sans hésiter, ça vaut le coup d'y aller ! Et puis vous savez quoi ? On recrute à tours de bras des ingénieurs dans l'aéronautique (c'est un très bon point pour rester à proximité des avions, non ?)
A+
Aurélien
Nota bene : je viens de poster mon message le plus long de l'histoire de JA