Premier MAYDAY, 04 MAI 2008
Dimanche 04 mai 2008. Après un week-end prolongé à Figari, nous reprenons la « route »
pour Creil.
Nous décollons de Figari sous plan de vol pour la traversée à 08h55, avec notre DR 400-120.
Passé le point NW au nord d’Ajaccio, nous demandons au contrôle de monter au FL85.
Accepté, nous montons.
A 10h27, nous passons le point MERLU au FL 85. En atteignant le niveau nous avions
mixturé. Nous sommes en contact avec Nice info.
Peu de temps après, alors que cela fait au moins 30 minutes que nous sommes au FL85, je
constate une légère baisse des tours moteur. J’augmente donc légèrement les gaz. Nouvelle
baisse, j’augmente encore, jusqu’à bientôt me retrouver plein gaz. Les tours chutent à 2200
tours, au lieu des 2500 habituels en croisière. Nous repoussons la mixture en position plein
riche. Les tours continuent de baisser.
Laurent tire la réchauffe carbu. Les tours chutent brutalement de 400 tours pour arriver vers
1600 tours. Nous repoussons la réchauff. Et regagnons quelques centaines de tours, avant d’en
reperdre.
La température d’huile est normale, pas d’alarme de pression d’huile ou d’essence, celle-ci est
en position ouverte, tout est normal.
Et pourtant, les tours chutent encore, lentement et régulièrement.
Nous lançons un MAYDAY à Nice info, en leur décrivant ce qu’il se passe. Nous adoptons la
vitesse de finesse max, nous sommes maintenant à 1500 tours moteur. Celui-ci vibre très fort.
Nous passons nos gilets qu’heureusement nous avions gardés à portée de main.
Nous demandons à rejoindre les côtes le plus vite possible. Laurent et moi sommes persuadés
que l’on va devoir amerrir, et voulons arriver le plus près possible du continent. Le contrôle
nous envoie vers Cannes.
Nous sommes au milieu du bleu, nous volons avec l’horizon artificiel.
Notre GPS portable confirme que nous sommes à 30 minutes des côtes les plus proches, c'està-
dire Cannes. Le temps est insupportablement long. Nous perdons de l’altitude, le moteur
vibre, j’ai peur qu’il s’arrête. Nous passons 7000 pieds. Le contact nous demande le nombre
de personnes à bord, si nous avons des gilets, un canot… C’est la procédure, mais cela
augmente notre stress, nous sommes tous persuadés de finir à l’eau.
Nous repensons à ce que nous a dit mon instructeur de Creil en cas d’amerrissage : arriver le
plus lentement possible et percuter une aile pour éviter de se retrouver sur le dos.
Et vers 6000 pieds, le moteur commence à regagner lentement et régulièrement des tours.
Nous en informons immédiatement le contrôle, qui nous demande nos intentions. Ne sachant
pas ce qui est en cause, nous demandons à poursuivre la procédure MAYDAY. Nous sommes
un peu rassurés, mais pas tant que ça. J’ai peur d’un mieux pour un pire ensuite…
Nous arrivons en visuel des côtes. Cela nous soulage. Nous gardons notre altitude de 6000
pieds au maximum, au cas où…
J’ai sorti la carte VAC de Cannes. Le GPS nous indique que le terrain est juste devant nous,
nous ne le voyons pas encore. Le moteur a repris un fonctionnement normal, nous sommes à
un peu moins de 100 noeuds.
Le terrain en vue, nous commençons à descendre, cette fois volontairement, pour nous
préparer à atterrir. Nous sommes passés avec Cannes, le contrôle est très gentil : n°1, piste au
choix, altitude au choix, circuit au choix. Nous préparons la machine, en conservant de la
vitesse, toujours au cas où il faudrait finir en plané. En final nous réduisons et sortons les
volets.
Nous atterrissons en emergency à cannes, sans encombre. Les pompiers nous attendent en
bout de piste, et nous escorte jusqu’à l’essence que nous avons demandé.
Nous sommes un peu secoués, nous ne comprenons pas ce qui a pu se passer. Je crois que
nous avons eu de la chance…
J’ai appelé mon instructeur de creil, qui a pensé à un givrage carbu. Il m’a conseillé de rester
15 minutes à faire tourner le moteur, en faisant les essais moteur, avant de repartir.
Les essais étant normaux, nous avons fait Cannes-Avignon, Avignon- Dijon Darois, puis
enfin Dijon darois-Creil.
Le moteur a tourné normalement, il n’y a rien eu à signaler.
Je n’ai jamais été aussi soulagée que de le poser à Creil, et de rentrer au parking.
A ce jour, après de nombreuses discussions avec des pilotes professionnels aussi bien que des
pilotes privés, deux hypothèses ressortent :
- un givrage carbu, même en régime de croisière, la glace s’accumulant lentement
jusqu’à provoquer la chute des tours après 30min de vol en croisière
- un problème de mixture trop riche ou trop pauvre, mais dans ce cas pourquoi serait-ce
arrivé après 30min de vol en niveau sans que les paramètres ne changent ?
Ce jour-là les conditions météo étaient les suivantes : l’isotherme zéro était au FL105,
il y avait quelques filaments blanc dans le ciel, et une légère brume au-dessus de la
mer.