Le XB-70 en chiffres
Premier vol : 21 septembre 1964 (White / Cotton)
Dernier vol : 4 Février 1969 (Fulton / Sturmthal)
Propulsion : 6 réacteurs General Electric YJ-93-3 de 12 350 kg de poussée avec PC
Envergure : 32 mètres
Longueur : 59,89 mètres
Hauteur : 9,22 mètres
Surface alaire : 585 m²
Masse à vide : 93 000 kg
Masse maxi au décollage : 249 500 kg
Vitesse max. atteinte : Mach 3,08 le 12 avril 1966 (White / Cotton)
Altitude max. atteinte : 74 000 pieds le 19 mars 1966 (White / Shepard)
Temps de vol total : 252 heures et 38 minutes
Temps de vol subsonique : 145 heures et 28 minutes
Temps de vol entre Mach 1 et 2 : 55 heures et 50 minutes
Temps de vol entre Mach 2 et 3 : 49 heures et 32 minutes
Temps de vol a Mach 3 et plus : 1 heure et 48 minutes
Pilotes :
Alvin White : 49 vols en place de pilote et 18 en copilote
Joseph Cotton : 19 vols en place de pilote et 43 en copilote
Van Shepard : 23 vols en place de pilote et 23 en copilote
Fitzhugh Fulton : 31 vols en place de pilote et 32 en copilote
Carl Cross : 1 vol en place de copilote
Donald Mallick : 4 vols en place de pilote et 5 en copilote
Emil Sturmthal : 3 vols en place de pilote et 7 en copilote
Versions :
XB-70A-1, serial number 62-0001
XB-70A-2, serial number 62-0007
XB-70B, serial number 62-0008. Construction abandonnée.
YB-70 : 11 appareils de pré-série. Jamais construits.
Le 6 février 1958, le WS-110A reçut son appellation officielle - XB-70 - et le 3 juillet suivant son nom de baptême : Valkyrie. Moins d'un mois plus tard, la partie "reconnaissance stratégique" (L) du WS-110A/L fut officiellement abandonnée en indiquant qu'un "autre système" répondrait à ces spécifications. On peut logiquement penser que cet "autre système" donnera soit naissance au SR-71 ou aux premiers satellites espions. NA commença donc à sélectionner différents sous-traitant. C'est ainsi que Westinghouse fut sélectionné pour mettre au point le système de défense électronique, IBM pour le système de navigation et de bombardement, General Electric pour le radar et propulsion. Boeing construira les ailes, Chance-Vought les empennages et les ailerons et Lockheed une partie du fuselage.
Le fuselage central qui contenait les 6 réacteurs avait une profondeur de 1,3 m, une largeur de 11,30 m et une longueur de 33,50 m. Les entrées d'air qui alimentaient les réacteurs étaient à géométrie variable. Chaque réacteur actionnait un alternateur de 60 kVA. Les gouvernes de vol comprenaient des élevons courant sur tout le bord de fuite, des surfaces canard mobiles et des empennages verticaux monoblocs. Seule une petite partie restait fixe. Presque deux fois plus lourd que l'avaient prévu les projets initiaux, le XB-70 reposait sur huit roues principales. Une cinquième roue montée sur chaque boggie servait à la mise en ouvre du système antipatinage, et la roulette de nez à diabolo s'escamotait entre les entrées d'air des réacteurs.
Le XB-70 introduisait pour la première fois sur un bombardier des empennages canards aussi importants. En effet, NA espérait ainsi réduire la traînée induite par le léger braquage des élevons sur un avion a aile delta lorsque celui-ci se trouve en régime transsonique par le mouvement des gouvernes se trouvant sur le bord de fuite des canards. Les canards servaient aussi a diminuer l'incidence de l'appareil lors du décollage et de l'atterrissage augmentant ainsi la visibilité et permettant de réduire les vitesses élevées d'un avion à ailes delta à l'atterrissage. Les gouvernes de ces canards pouvaient être abaissés de 20 degrés. Contrairement aux avions modernes - comme le Rafale ou l'EF-2000 - qui utilise les canards pour accroître leur maniabilité, le XB-70 utilisait les canards comme un empennage horizontal. La verrière pouvait être placée dans deux positions : relevée pour les hautes vitesses et abaissée pour les faibles vitesses.
L'abandon le 10 août 1959 du programme de carburant "Zip" amputa le XB-70 de 10% de sa distance franchissable. En conséquence, une des deux soutes a bombes prévue au départ fut remplacée par des réservoirs. Heureusement, le remplacement des J93-5 fonctionnant au boron par la version -3 brûlant du kérosène JP-4 "classique" n'eut que peu de conséquences sur la structure.
Le début de la fin
Depuis pas mal de temps déjà, les Soviétiques développaient leur arsenal de missiles balistiques au détriment de bombardiers. Dans le même temps, ils s'étaient appliques à mettre en ouvre tout un système de défense antiaérien pour mettre fin aux vols de U-2 au-dessus de leur territoire. Les USA, a la lumière de ces éléments s'orientèrent de plus en plus vers une composante nucléaire composée a 100% d'ICBM. De même que certains pays comme la Grande-Bretagne (abandon du TSR-2) ou la canada .
La découverte du Mig-25 Foxbat, visiblement destiné à contrer la menace du XB-70, et l'abandon le 23 septembre 1959 du programme F-108 précipita la fin du B-70. En effet, avant même son premier vol le B-70 ne serait pas capable de traverser les défenses soviétiques pour atteindre son objectif a haute altitude. Et il n'était pas possible de l'adapter pour la pénétration a basse altitude. De plus l'abandon du F-108 se traduisit par une augmentation de 180 millions de $ du coût du B-70 car ces deux programmes étaient finances à part égal mais surtout parce qu'ils partageaient un bon nombre d'équipements. Le F-108 avait fait les frais des coupes sombres dans le budget de la défense a la fin du mandat d'Eisenhower et le XB-70 n'allait pas tarder à le rejoindre... et ce malgré l'appui de bon nombre de défenseurs du bombardier pilotés, arguant de la polyvalence d'un tel appareil sur l 'ICBM.
L'abandon
C'est ainsi que le 3 décembre 1959, le département de la défense annonça l'abandon du XB-70. Le budget alloué au B-70 fut donc réduit de 80% mais il fut conclut qu'un prototype (S/N 62-0001) serait quand même construit. Ce prototype devant effectuer son premier vol en décembre 1962. Pendant ce laps de temps, les défenseurs du bombardier pilote tentèrent de sauver le programme XB-70 car il n'avait plus aucun programme pour remplacer les B-52 et 58. Finalement le congrès vota en juillet 1960 un crédit supplémentaire pour la construction d'un deuxième prototype (S/N 62-0007) et de 11 YB-70 de présérie. Le programme B-70 semblait repartir. A partir de septembre, NA relança les études pour les sous-systèmes majeurs de l'avion et les contrats avec Westinghouse et Motorola furent reconduit pour le système de défense et de mission. Mais ce "sursaut" de vie ne dura pas très longtemps. En effet, le président Kennedy venait d'être élu et il demanda à son nouveau secrétaire d'état a la défense, Robert S. McNamara, une revue des différents programmes d'armements. Inévitablement, la conclusion tomba : l'ICBM est moins cher et plus efficace au premier abord. Le 31 Mars 1960, le programme B-70 était une nouvelle fois annulé . mais la construction de trois prototypes étaient maintenu pour explorer les vols a Mach 3 et les problèmes liés aux avions de grande taille. De plus, le programme SST destiné à développer un avion de transport civil supersonique venait d'être lancé et on voyait dans le XB-70 un formidable banc de test. Parmi les sous-systèmes, seul le système de navigation et de bombardement étudié par IBM fut poursuivi.
Le deuxième prototype
Le XB-70A-2 effectua son Roll-Out le 29 mai 1965. Extérieurement, il se distinguait du -1 par une aile ayant un dièdre positif de 5 degrés afin de lui procurer une meilleure stabilité lors des vols supersoniques. Le système de contrôle de l'entrée d'air était automatique et le réservoir num. 5 était fonctionnel. Le système hydraulique fut entièrement revu. Hormis les marquages (numéro de série), on peut facilement l'identifier à son radôme inférieur peint en noir.
Du fait de l'expérience déjà acquise avec le premier prototype, les vols du second furent plus rapides et dès le premier vol (le 17 juillet 1965) le XB-70A-2 atteignit Mach 1,41 et 42 000 pieds avec les saumons d'ailes abaissés de 65 degrés, mais cette fois pas de prime pour NA .Le programme d'essais du XB-70A-2 permit à Cotton, Shepard et Fulton de prendre les commandes du Valkyrie en place de pilote pour la première fois. C'est ainsi que Cotton pilota le XB-70A-2 lors de son deuxième vol le 10 août 1965 au cours duquel il atteignit Mach 1,45 et 41 000 pieds. Bien que plus performant et un peu plus fiable que le premier, le second Valkyrie avait toujours des problèmes d'hydraulique et du système de freinage. En effet, le 30 avril 1966 le train d'atterrissage refusa de descendre pendant près d'une heure. Finalement le XB-70A-2 atterrit une nouvelle fois sur le Roger Dry Lake éclatant au passage 6 des 8 pneus du train principal.
Néanmoins l'avion se comportait bien et au cours du 5ème vol le système de contrôle automatique de l'entrée d'air fut activé. L'appareil atteignit Mach 1,85. Mach 2 fut franchit le 29 septembre et Mach 3 le 3 janvier 1966. Entre-temps, le 21 décembre, alors qu'il volait à Mach 2,9 le système de lubrification du réacteur numéro 4 tomba en panne. Pendant la descente vers Edwards, le moteur 6 fut également coupé. Le 12 janvier, le XB-70A-2 atteignit sa vitesse la plus importante avec 3250 km/h et le 19 mars il atteignit sa plus haute altitude : 22 550 mètres.
Un vol d'essai typique du Valkyrie se déroulait comme suit : après le décollage, le train d'atterrissage était immédiatement rentré et l'appareil accélérait rapidement par palier. Entre 740 et 1100 km/h les saumons d'ailes était abaisses en position 25 degrés afin de procurer une meilleure stabilité dans la zone transsonique. A Mach 0,95 le pare-brise se relevait pour réduire la traînée. La visibilité vers l'avant était alors quasiment nulle et l'avion se pilotait aux instruments. Puis vers Mach 1,5 et 32 000 pieds les saumons étaient complètement abaisses afin de procurer plus de portance. L'avion continuait alors son ascension jusqu'à 50 000 pieds. A Mach 2 se produisait un phénomène indispensable a la poursuite du vol : l'amorçage des entrées d'air par la formation des ondes de choc dans la prise d'air. Parfois, il arrivait qu'une des entrées d'air de désamorce. Ce phénomène arrivait plus fréquemment sur le XB-70A-1 qui n'était pas pourvu du système automatique de contrôle. Lors d'un désamorçage, l'avion se cabrait brusquement et s'inclinait rapidement du côté de l'entrée d'air désamorcée, la poussée chutant alors brutalement. Le SR-71 eu aussi a faire à ce genre de phénomène. En l'absence de désamorçage, le vol pouvait se poursuivre jusqu'à Mach 3 et 70 000 pieds.
Le troisième Valkyrie
Lorsque la décision d'abandonner le programme XB-70, un troisième prototype était en construction et ne fut jamais terminé. Ce troisième prototype aurait été beaucoup plus proche de la version de série s'il avait vu le jour. Son équipage se composait de 4 membres : 2 pilotes et 2 opérateurs systèmes. Le système de navigation et de bombardement aurait été installe et la soute agrandie. Plusieurs expérimentations furent envisagées pour l'utilisation de ce troisième XB-70 : observatoire astronomique volant, radar aéroporté, lanceur ou destructeur de satellite, banc d'essais volant pour le ravitaillement a vitesse supersonique, premier étage d'un lanceur réutilisable, etc .
Vol de concert
A partir de novembre 1965 et jusqu'en juin 1966, le programme d'essais en vol vit les deux Valkyrie participer de concert aux essais. C'est ainsi que le 3 janvier 1966 et le 24 mars, les deux Valkyrie volèrent dans la même journée. Cependant, il ne semble pas que les deux XB-70 volèrent l'un à coté de l'autre. Le 11 janvier XB-70A-1 prit même l'air deux fois dans la même journée. Une nouvelle fois, le système hydraulique de servitude tomba en panne au cours d'un vol a Mach 2 le 7 mars 1966 et lors de l'atterrissage d'urgence sur le Roger Dry Lake le boggie gauche se "bascula". Cet incident, sans gravité (l'appareil fut réparé deux semaines plus tard), aurait pu être fatale a l'appareil si jamais le train s'était affaissé. Un autre incident qui aurait aussi pu détruire l'appareil eu lieu peu après le décollage du 27eme vol le 30 avril 1966 : le train avant refusa de se rétracter complètement et la roulette resta à moitié sortit. White tenta par deux fois un atterrissage en espérant que le choc avec le sol du train principal ferait se débloquer le train avant mais rien n'y fait. Finalement les ingénieurs trouvèrent un moyen de faire redescendre la roulette et l'avion put se poser normalement.